La voie du cordonnier - Marcel Mercier - Itinéraire d'un passionné de cuir et de roche

"A soixante ans passés, qu'est-ce qui peut bien me pousser à recommencer cette voie pour la troisième ou quatrième fois, plus de trente ans après l'avoir réalisée ? La gloire, la reconnaissance ? Non, personne n'en a cure. Mon coiffeur m'a dit un jour: « moi aussi je fais de la montagne. L'été dernier, j'ai fait tous les cols des Pyrénées en voiture». Imparable. Alors pour mon ego ? Non, à mon âge on sait que la vie n'est pas une longue course tranquille. La performance sportive ? Non, les voies AD - assez difficiles - ou D - difficiles - ne sont plus dans l'air du temps et plutôt désuètes, voire ringardes. Le plaisir ? Oui, celui d'être là à ma place, dans un écrin de neige et de rocs, sans contrainte, sans évaluation, sans monnaie d'échange, sans flicage ni compromission. ( ... ) Pendant des an­nées, j'étais tellement fou d'adrénaline que j'avais complètement intégré et accepté l'idée de mourir en montagne. Je voulais à tout prix me battre, jusqu'à me battre moi-même. Me perdre corps et âme sur les rochers. Vaincre par le corps, mais aussi par l'esprit : l'intel­ligence du geste pour comprendre la lecture du passage, cerner le rocher, l'épouser et m'oublier."

Né en 1948 dans une famille de cordonnier, Marcel Mercier semble avoir un destin tout tracé. Comme son père avant lui, il sera travailleur de peaux, rabouteur de cuir aux mains tannées, artisan formé dès le plus jeune âge aux plus pures techniques de la cordonnerie. Cependant, si le jeune homme emprunte le chemin naturellement offert, il cherche aussi le défi personnel par lequel il se réalisera.